La fiscalité française, outre sa complexité, est une source intarissable de râleries et de crêpage de chignon entre capitalistes et socialistes. L’impôt en France représente 44% du PIB, une part considérable pour un des pays aux taux d’imposition parmi les plus élevés d’Europe. D’autre part, plus de 500 niches fiscales ponctuent le code des impôts et permettent à différentes corporations de bénéficier de certaines exonérations qui coûteraient à l’état plus de 70 milliards d’euros par an. Alors, fiscalité globale ou fiscalité de niche ?
Les niches fiscales, telle cette exonération sur les investissements dans la création d’entreprise accordée aux assujettis ISF, sont, et c’est ici un exemple des plus parlants, vecteur de création d’emploi et d’augmentation de la valeur du travail. L’argent économisé sur l’impôt est en général réinjecté dans l’économie, à un endroit ou un autre. Ainsi, le passage de la TVA à 5,5% pour la rénovation de l’habitat a-t-il généré une croissance phénoménale du travail dans le milieu du bâtiment. Alors que la question se pose aujourd’hui de supprimer, totalement et définitivement ces niches fiscales pour financer par exemple le RSA, l’idée que cet argent qui était hier économisé et réinjecté directement dans l’économie puisse demain servir à financer les plus démunis par une loi d’assistanat fait grincer beaucoup de dents. Mais les niches fiscales ne sont pas qu’incitatives. Elles sont parfois à vocation sociale, telles ces exonérations qui interviennent pour pallier à telle baisse de récolte ou à l’augmentation intolérable du coût de l’énergie et son impact sur l’industrie de la pêche. Alors, supprimer seulement les niches qui profitent aux plus aisés ?
Les deux derniers gouvernements on déjà tranché en partie cette question en instaurant les boucliers fiscaux (à 60 puis 50%) bénéficiant d’abord aux contribuables les plus aisés et destinés à effacer les traces de l’impôt sur la fortune. Le plafonnement, aujourd’hui pointé comme une arme efficace contre les niches fiscales, s’est déjà retourné contre les tenants sociaux du principe puisque qu’il bénéficie déjà aux plus aisés. La fiscalité de plafonnement permet une égalité des traitements qui plaît à la multitude, lui donnant l’impression que personne n’ira profiter d’un système qui se veut totalement égalitaire. Cependant, le monde, dans son changement constant, fait des nécessiteux chaque jour différents et tous ces groupuscules demandent un jour ou l’autre la création d’une « niche » fiscale qui finit par fonctionner comme une sorte d’assurance, de « revenu minimum » du travail ou du capital. Et toute niche attire les « professionnels » de l’exonération qui espèrent y trouver un nouveau moyen d’échapper à l’impôt en bonne et due forme. La lutte contre ce type d’abus est difficile, longue et coûteuse.
On le voit, chaque principe possède de façon intrinsèque ses qualités et ses défauts, et le juste milieu vers lequel tend la politique actuelle ne permet pas de circonvenir aux défauts de l’un ou de l’autre. Crêpages de chignons, grinçages de dents et râleries n’ont pas fini d’envenimer le débat politico-économique de notre pays.